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Le village de Sahuyé, dans la Sous-Préfecture de Gomon, a fêté Dipri le mercredi 16 mai 2012 dernier. Cela nous donne l'occasion de parler de cette fête de génération d'un autre genre.
Comme il est de tradition, la veille chaque famille s'est rendue au cimetière pour honorer ses morts. En y faisant des libations pour demander aux défunts de veiller sur leurs familles depuis
l'au-delà. Lors de ce cérémonial, l'officiant demande aux morts d'apporter bénldiction, santé, chance et réussite à chaque membre de famille, présent ou absent du fait d'un empêchement ou de
l'éloignement. Cela, selon la disposition d'esprit des officiants de chaque famille. Lors de cette cérémomie de libation, les bouteilles de liqueur et d'eau de vie entamées doivent être vidées au
cimetière. Oü certains restent parfois jusqu'aux aurores. Quand d'autres rentrent à la maison pour se préparer à la grande fête qui a toujours lieu la veille de la fête de Dipri. En attendant
celle du lendemain au cours de laquelle il se passe des choses invraisemblables pour un esprit cartésien. Mais, en attendant minuit, heure solennelle de la fin du quartier libre, une sorte
d'extinction des feux, les estivants font la foire. Ils envahissent les gargottes, bars, maquis et autres qui s'établissent dans le village à la veille de chaque fête de Dipri. En effet, il est
interdit de rentrer dans le village passé minuit, la veille de la fête. C'est la raison pour laquelle tous ceux qui veulent participer à cette nouvelle année du calendrier abidji se doivent
obligatoirement d'y arriver la veille avant cette heure fatidique. Sous peine de subir le courroux des génies et autres mauvais esprits qui ne manquent pas de rôder. Puis, à une certaine
heure très avancée de la nuit, un groupe de jeunes et de personnes d'un certain âge parcourent le vilage en criant à tue-tête qu'il est temps de rentrer à la maison. A cette information, tous les
fêtards rentrent chez eux à contre coeur mais obtempérent quand même à cette injonction. Le refus d'obéir à cet ordre de quitter la rue est toujours lourd de conséquences morales pour ceux qui y
sont réfractaires. Car, après avoir constaté que la rue est vide de tout individu, le groupe d'individus commis par les sages du village procèdent à des bénédictions et à des incantations pour
purifier tout le vilage de toutes les mauvaises pensées de tous ceux qui participeront à la fête le lendemain. Le lendemain, le village se réveille avec un tout autre visage. En effet, très tôt,
aux environs de 6h du matin, les femmes s'affaire à apprêter le repas plus destiné aux défunts dont c'est un peu plus la fête qu'aux membres de la famille. L'on leur donne à manger en mettant
dans un récipient, des oeufs et un peu de la nourriture, généralement du foufou (Ndlr de la banane plantain écrasée en pâte et mélangée à de l'huile de palme) que toute la famille mange. Mais
bien avant, un peu plus tôt, le fils aîné de chaque famille fait une libation en direction du géniteur défunt. En lui demandant à lui et à tous ceux de ses proches qui sont également dans
l'au-delà, de veiller sur la famille et de lui apporter la bénédiction, la protection, la santé, la réussite et surtout sagesse et discrnement à ses petits-fils et petites-filles afin que ces
derniers contribuent à maintenir haut la notoriété de la famille. Puis, les fils aînés de chaque famille se retrouvent dans la grande famille pour procéder, par le biais du chef de la grande
famille, à une cérémonie de libation générale au nom de l'ensemble de tous les enfants. Après ce rituel qui se rèpète chaque année, chacun regagne son domicile. Et ceux qui sont des initiés
au "kpon", force qui leur permet de s'éventrer et de faire disparaître la plaie en la faisant cicatriser sur place, se rendent tous de blanc vêtus à la rivière sacrée oü ils vont présenter leurs
respects et demander la protection au génie afin de leur donner la permission de faire la fête ainsi que l'autorisation de faire certaines prouesses pour les uns et les autres. C'est de retour de
la rivière que tout se précipite. Pendant ce temps, le tam-tam sacré appelle et rappelle à chacun des habitants du village et surtout aux initiés qu'il est l'heure que chacun se prépare à rentrer
dans la danse. Puis soudain, un cri se fait entendre, une jeune personne marche à pas pesant en psalmodiant des chants incantatoires. Puis soudain, elle se retourne comme cherchant quelque chose
dans le lointain, les yeux fixes puis reprend son chant et entre dans une cour. Oü elle se plante devant une de ses amies et l'enlace. Aussitôt, l'autre jeune fille tombe en transe. Puis toutes
les deux se dirigent dans la rue et vont s'incliner devant le tambour sacré. Le ton de la fête est donné. Tout le village est en ébullition. Les gens vont et viennent dans une transe collective
qui effraie celui qui assiste à cette fête, le Dipri, pour la première fois de sa vie. A Sahuyé, l'attraction de cette fête est un jeune homme à l'allure frêle répondant au nom de Nicaise. Ses
sorties sont toujours précédées d'un crémonial. Ses compagnons forment une procession et lui ouvre le chemin. Il se marche en entonnant des chants de défi à des adversaires inconnus car des
adversaires, Nicaise en a certainement parce qu'aux yeux de tous les autres initiés, c'est le Pelé de la transe et du coup de couteau pour s'éventrer. Arrivé sur la grande place du village oü se
trouve le tam-tam sacré, il va s'incliner devant les tambourineurs d'abord, avant de rentrer chez lui pour demander à ses oncles et à ses tantes, l'autorisation de s'éventrer. Mais la veille, il
aura d'abord offert une bouteille de liqueur aux femmes de la famille, afin qu'elles veillent sur lui mystiquement. Dès que la permission lui est accordée, Nicaise se déchire le ventre qu'il
transperce de 21 coups de couteau, faisant fuir ceux des spectateura venus voir ce que certains cartésiens donnent pour une illusion d'optique. Le sang gicle et asperge les spectateurs dont
certains, en l'occurence les femmes ne peuvent supporter et hurlent de frayeur en s'enfuyant. Partout dans le village, c'est le même scénario jusqu'au soir. C'est dans ces démonstrations de
puissance qu'un homme s'ouvre le crâne avec une bouteille dont il mâche les tessons. Il referme sa plaie et ce sont des cris de joie. A 18h, tout le monde, initiés et invités se retrouvent en
cercle à un endroit précis du village pour lancer en l'air, une touffe d'herbe, symbolisant la fin de toutes les souffrances de tous ceux qui sont à la fête. Tout le monde se sépare dans la joie
et la gaîté en attendant l'année prochaine.
Gervais Y DJIDJI
gervdji@yahoo.fr