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Le militaire, rebelle, condamné, et… commando invisible a été tué mercredi dernier par les Forces républicaines.

Acteur militaro-politique ivoirien, le «général» avait depuis son retour à Abidjan, la capitale économique de Côte d’Ivoire, des airs de serpent de mer. Se voulant l’un des maîtres de la nouvelle scène ivoirienne, Ibrahim Coulibaly (Ib), a été tu au cours d’un assaut des Forces républicaines de Côte d’Ivoire dans la soirée de mercredi, 27 avril 2011. Adversaire du Premier ministre Guillaume Soro aux côtés du président Alassane Ouattara, il a entretenu une rivalité de longue date avec celui dont il fit le porte-parole de la rébellion aux premières heures de l’insurrection de septembre 2002. Douze ans après être apparu au grand jour, le sulfureux Ibrahim Coulibaly a tenté de sortir à nouveau la tête de l’eau. A la tête de 5000 hommes (selon ses dires), celui qui fut sergent-chef de l’armée ivoirienne, s’est présenté depuis ses attaques contre les positions des troupes du président Gbagbo, un général à la tête du «Commando invisible» qui contrôlait jusqu’à mercredi soir, l’essentiel de la très symbolique commune d’Abobo, à Abidjan. Homme venu du Nord, Ibrahim Coulibaly est né en 1964 à Bouaké, capitale informelle de la rébellion nordiste ivoirienne devenue les Forces nouvelles (Fn). Entré dans l’armée de son pays en 1980, il est affecté à la garde rapprochée du dernier Premier ministre de Félix Houphouët-Boigny: Alassane Dramane Ouattara en 1990.

S’il nie par la suite et des années plus tard d’être proche de l’ancien directeur général adjoint du Fonds monétaire international (Fmi), privilégiant son indépendance militaire à toute allégeance au sérail politique qui l’a tant déçu. Il est agacé par la question de l’ivoirité qui pour point culminant 1999 sous Henri Konan Bédié. C’est ainsi qu’on le trouve à la tête de la mutinerie militaire qui se mue en coup d’État le 24 décembre 1999. Ibrahim Coulibaly que ses hommes appellent «le major», en première ligne cède le siège au général à la retraite, Robert Gueï. Plus tard, Ib se dira déçu par le vieux général enivré par un pouvoir qu’il n’avait pourtant pas cherché. Suspecté de velléités putschiste en juillet 2000, le sergent-chef Coulibaly est affecté à l’ambassade de Côte d’Ivoire au Canada. En octobre 2000, c’est de très loin donc qu’il observe la chute du général Guéï et l’avènement au pouvoir de Laurent Gbagbo. Son nom est pourtant cité dans l’improbable «complot de la Mercedes noire», qui aurait tenté de déstabiliser le régime dans la nuit du 07 au 08 septembre 2001. Plus véritablement au Canada, Ib s’établit à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso où des sources diront plus tard qu’il a eu le temps de préparer un autre coup de force. Dans une villa du quartier Somgandé, l’adjudant Tuo Fozié paraît mener les opérations.

Brimades
Le 19 septembre 2002, Zaga Zaga, Watao et Shérif Ousmane attaquent Abidjan. Pour sa part, Ib reste à Ouaga, chaperonné par des autorités burkinabè bienveillantes. Admirateur du commandant afghan Massoud, il se considère comme un membre éminent de l’élite militaire ivoirienne. Son grade modeste est la résultante des brimades imposées aux Ivoiriens du Nord. Et pourtant, le commandant (autre nom qu’une partie de la troupe attribue au «rebelle», rêve de descendre un jour le boulevard Giscard d’Estaing comme le général de Gaulle fut accueilli en libérateur sur les Champs-Elysées. Il attendra donc son heure à l’écoute son idole et parrain (?): Blaise Compaoré. En ces heures de conquête du pouvoir en Côte d’Ivoire, depuis des restaurants ouagalais (pas toujours discret), Ib instruit, par téléphone satellitaire, le politicien en herbe Guillaume Soro. Les rebelles ne prennent pas Abidjan. La Côte d’Ivoire se fissure durablement. Si Ib jouit, à l’origine, d’une réelle popularité dans le milieu rebelle, les absents ont toujours tort. Au fil des mois, Soro impose sa cravate aux treillis dépareillés, à mesure que les chefs de guerre s’embourgeoisent.

Août 2003, Ibrahim Coulibaly s’envole pour la France. Quadrature de cercle? Le piège se referme sur celui qui est alors arrêté à Paris pour tentative de coup d’État. Convaincu que Coulibaly a enrôlé d’anciens légionnaires français, le juge Jean-Louis Bruguière expérimente pour la première fois la toute nouvelle loi française contre le mercenariat. Relâché sous caution en septembre, et bien que sous contrôle judiciaire, le serpent de mer replonge.
Les relations entre les partisans d’Ib et les pro-Soro se dégradent. En juin 2007, on attribue à Coulibaly l’attentat contre un Guillaume Soro devenu Premier ministre de Laurent Gbagbo, à l’issue des accords de Ouagadougou. Le «commandant» se retrouve au Bénin. Le 27 décembre 2007, il est accusé d’une autre tentative de putsch. Un mandat d’arrêt international est lancé contre lui. Le 4 juin 2008, Coulibaly est jugé coupable de «direction ou organisation d’un groupe destiné à la pratique du mercenariat». Par contumace, il est condamné à quatre ans d’incarcération. Comme lui, l’avocat ivoirien Mamadou Diomandé Paul Léonelli écopent de prison ferme dans un premier temps, avec sursis après appel.
De retour à Abidjan en janvier 2011, il tient à jouer un rôle que Guillaume Soro lui a définitivement confié Pour l’éternité.

   
Tag(s) : #Politique
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