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Le général François Bozizé, arrivé au pouvoir par un coup d’Etat a du mal à stabiliser durablement la Centrafrique (Ph : DR).


 

Face aux rebelles et autres djihadistes, l’armée malienne a reculé en leur cédant tout le septentrion du pays en mars-avril 2012. Depuis, s’agissant d’engager une opération militaire de reconquête de cette partie du Mali, on tergiverse, on parlemente à n’en pas finir, on négocie le concours de N’Djamena, dont l’armée est réputée avoir une solide expérience de la guerre surtout dans ces contrées désertiques, mais Idriss Déby Itno se fait désirer et pose des conditions.

 

Certes, comparaison n’est pas raison, surtout quand les contextes sont différents, mais on est étonné de constater qu’en l’espace d’un battement de cils, le président tchadien a accédé à la demande de renfort formulée par François Bozizé pour contrer les rebelles centrafricains qui lui donnent ces derniers jours du fil à retordre.

En effet, la Centrafrique vient de renouer avec la violence. L’armée est de nouveau aux prises avec les rebelles de la Coalition Séléka (alliance en langue songo). Les combats, qui font rage, tournent en faveur des rebelles, lesquels en l’espace d’une semaine, ont pris le contrôle de plusieurs localités du Nord, du Nord-Est et du Centre comme N’délé, Sam Ouandja, Ouadda, Bamingui, Bria…

Cette dernière ville est tombée dans la matinée du mardi 18 décembre 2012. Dans toutes ces villes, l’armée régulière a reculé, a opéré, comme on dit dans le jargon militaire, « un repli tactique » qui, sous nos tristes tropiques, traduit tout bonnement la débandade des soldats.

Alors, pour contrer ceux qui lui troublent le sommeil, François Bozizé a passé un coup de fil à son grand ami Idriss Déby Itno. Ce dernier a aussitôt dépêché des guerriers tchadiens avec pour mission de renforcer les forces armées centrafricaines dans leur contre-attaque pour reconquérir les villes tombées aux mains des rebelles. Nul doute qu’avec ce corps expéditionnaire en renfort, Bozizé parviendra à sécuriser tout le territoire ou alors à conserver encore son fauteuil.

Il faut avouer que Déby est déjà coutumier du fait, puisque c’est la troisième fois en moins de dix ans qu’il est appelé à la rescousse par un Bozizé aux abois. C’est d’ailleurs avec l’appui des soldats tchadiens que le coup d’Etat qui a renversé Ange-Félix Patassé a été perpétré en 2003. Depuis cette date, la sécurité rapprochée du président centrafricain avait toujours été assurée par un commando blindé tchadien. Ce n’est qu’en octobre 2012 que N’Djamena a rappelé ses « chiens de garde ».

Avec cette nouvelle poussée de fièvre dans un pays habitué aux mutineries, aux coups d’Etat et autres rebellions, il était normal que le numéro 1 tchadien assure le service après-vente, puisqu’après tout, comme nous le disions tantôt, ce sont ses hommes qui avaient aidé Bozizé à chasser Patassé et à s’incruster dans un fauteuil présidentiel qu’il ne semble pas particulièrement pressé de quitter, surtout qu’on le suspecte de vouloir tripatouiller les textes fondamentaux de la Centrafrique pour mieux s’éterniser au pouvoir.

Pour tout dire, c’est bien d’appeler les amis aux secours, mais le véritable problème centrafricain relève d’une question de gouvernance, que le corps expéditionnaire tchadien ne saurait régler. Bien au contraire, Déby et ses soldats gagneraient à faire attention et surtout à se rappeler le sort qui est aujourd’hui celui de Jean Pierre Bemba dont les miliciens avaient volé au secours de Patassé en commettant des crimes, ce qui est fréquent dans ce genre d’opérations, où les forces étrangères appelées en renfort ont tendance à se comporter comme territoire conquis. Finalement, l’enfant gâté de la politique congolaise est à la Haye où il est poursuivi par la Cour pénale internationale.

De plus, la rapidité avec laquelle le soutien tchadien est parvenu en Centrafrique laisse supposer que les deux compères (Déby et Bozizé), peu soucieux du respect des règles et procédures démocratiques, n’ont pas requis l’aval de leur Parlement respectif avant d’entamer un tel déploiement. On le sait, le président demande l’accord des parlementaires avant d’engager l’armée, surtout sur un théâtre étranger tandis que celui qui appelle à l’aide doit obtenir le visa des députés pour autoriser le déploiement des soldats étrangers sur le territoire national. Cette disposition est pertinente, puisqu’elle montre que l’armée n’est pas une force privée au service particulier du président de la République.

Il est temps que Bozizé intègre cette vérité : le Tchad ne sera pas toujours là à le soustraire des pétrins. La meilleure façon de mieux diriger et quitter ensuite le pouvoir dans la paix, c’est de pratiquer l’ouverture et le dialogue avec ses adversaires. Autrement, N’Djamena aura beau déployer des régiments entiers en Centrafrique, ça ne servira à rien, sinon qu’à retarder l’échéance.

 

Tag(s) : #Politique
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