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Ouverture des archives sur la guerre de Kippour : les erreurs de Dayan et la panique des dirigeants

7 ans après la guerre de Kippour, l’archiviste de l’Etat d’Israël a publié des documents tenus secrets jusque là, particulièrement des protocoles de réunions entre le chef du gouvernement de l’époque Golda Meïr, le ministre de la Défense Moshe Dayan, le chef d’état-major de Tsahal David Elazar et le chef des renseignements de Tsahal, Eli Zaïra. A bien des égards, ce que la presse israélienne considère comme des révélations ne sont que des confirmations de ce que les historiens savaient déjà. Des généraux et stratèges, divisés entre eux sur la possibilité d’une guerre imminente et sur les mesures à prendre, demandaient l’arbitrage d’une femme dont le bon sens, malgré certaines erreurs d’appréciations, limita la catastrophe.

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Dayan et Dado

Les protocoles publiés font d’abord et avant tout justice au chef d’état-major David Elazar dit Dado. Lors de la commission d’enquête Agranat constituée après la guerre, il porta le chapeau des fautes partagées par tous et fut contraint de démissionner. Moshé Dayan, dont les erreurs d’appréciations sont aujourd’hui flagrantes, fut innocenté. A quelques heures de la guerre, Dado fut le seul à percevoir le danger imminent et à demander la mobilisation de tous les réservistes.

Lors d’une réunion du cabinet de sécurité le 8 octobre 1973, quelques heures avant l’offensive arabe, Dado avança l’idée d’une attaque préventive : "Cela permettra de sauver un grand nombre de vies. Je suis sûr que nous pouvons le faire" déclara-t-il. Il proposa que les forces israéliennes détruisent l’aviation et les missiles syriens "en l’espace de trente minutes". Il expliqua qu’il lui suffisait de quatre heures pour s’organiser et déclencher une frappe aérienne. Moshé Dayan, qui ne manquait pas de verve, s’opposa à cette stratégie : "Nous ne pourrons frapper la Syrie que si l’Egypte nous attaque". Il s’opposa également à la mobilisation complète des réservistes. Golda, qui pensait qu’une mobilisation totale était une bonne chose, s’inclina cependant devant le conseil de Dayan d’autant que le chef des renseignements de Tsahal, Eli Zaïra, était persuadé que Sadate ne voulait pas la guerre. Lui et Israël Galili, se fiaient à une source interne égyptienne qui se révèlera non crédible. Quatre heures seulement avant que la guerre n’éclate, tous sont persuadés, en dehors du chef d’état-major, que Tsahal a les moyens de contenir l’agression.

Dayan voulait jouer la prudence sur le plan international. De plus, il s’appuyait sur les services de renseignements américains qui affirmaient qu’une offensive n’était pas imminente. "Le monde entier va dire que nous avons déclaré la guerre", déclara-t-il alors. 24h plus tard, le refus de mobiliser les réservistes et de lancer une attaque préventive se révéla comme les principales erreurs de la guerre de Kippour.

Les protocoles des conseils des ministres et des réunions restreintes, les premiers jours de la guerre, mettent en lumière la panique des dirigeants israéliens face à l’offensive arabe. Dayan en particulier était persuadé que la fin de l’Etat d’Israël était arrivée et proposa même, lors d’un conseil de cabinet, d’envisager l’utilisation de l’arme nucléaire. Golda Meïr refusa catégoriquement une quelconque discussion sur ce sujet.

Le ministre de la Défense, héros de Tsahal, avait perdu les pédales. Dans un vent de panique, il conseilla d’abandonner les blessés sur les champs de bataille en opposition totale aux règles de l’armée israélienne et proposa d’enrôler tous les garçons de 17 ans ainsi que des Juifs de la Diaspora.

Le deuxième jour de la guerre, on décide d’envoyer Itzhak Rabin au Sinaï pour se rendre compte de la situation sur place. Il revient en déclarant : ’Tout va bien’. Les informations du front sont contradictoires au point qu’il est difficile pour les dirigeants d’avoir une vue d’ensemble de la situation. Les décisions prises sont incohérentes. Au troisième jour de la guerre, Golda envisage de se rendre secrètement chez le président américain Nixon pour lui demander de l’aide. Dayan propose de bombarder Damas pour "sortir les Syriens de la guerre" mais finalement la suggestion est rejetée.

La publication de ces documents historiques de première main réveille à nouveau les blessures d’une guerre qui reste dans la conscience collective un véritable traumatisme. 37 ans plus tard, il est facile de lapider telle ou telle personnalité de l’époque et de faire des procès posthumes. 37 ans plus tard, la volonté de détruire l’Etat d’Israël est-elle toujours aussi intense chez les Arabes ? Une nouvelle guerre de Kippour est-elle toujours possible et les actuels dirigeants israéliens sont-ils mieux préparés que ceux de l’automne 1973 ?

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