Devoir et droit d’ingérence

L’Envoyé spécial américain pour l’Afghanistan et le Pakistan, Richard Holbrooke, et le chef de l’état-major interarmes américain, l’amiral Michael Mullen, visitent l’Afghanistan au lendemain de la conclusion du sommet de l’OTAN. Selon ce dernier, « la tendance dans le sud et l’est lors des trois dernières années a été dans la mauvaise direction », mais il est « convaincu » que l’envoi des 5000 militaires supplémentaires promis à Strasbourg, qui seront pour la plupart déployées dans le sud, « va certainement nous permettre de changer le cours des évènements ». Les renforts seront chargés d’assurer la sécurité des élections et de former les forces de sécurité afghanes.

Bernard Kouchner annonce que l’UE devrait proposer mardi à La Haye l’envoi en Afghanistan de gendarmes issus de la Force européenne de gendarmerie FGE). Selon lui, « on peut avoir cela sous le même chapeau, si cela doit être EUPOL ou si cela doit être l’OTAN, je n’ai aucune contre-indication à cela mais je sais que l’on ne mélange pas la direction de la police et la direction de la gendarmerie au niveau opérationnel ».

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a proposé hier d’envoyer en Afghanistan des éléments de la Force européenne de gendarmerie (FGE) afin qu’ils contribuent à la formation de la police afghane. Son homologue britannique, David Miliband, a pour sa part demandé un plus grand rôle de l’UE en Afghanistan puisqu’on assiste à « une impasse stratégique » dans certaines régions par manque de troupes et par la présence de caveats.

Réunis hier à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont décidé « d’examiner urgemment les options pour augmenter l’appui européen au peuple et au gouvernement afghan ». Le Haut-Représentant de l’UE pour la politique étrangère, Javier Solana, a également souhaité que les effectifs de l’EUPOL Afghanistan soient doublés le plus vite possible. Par ailleurs, le Commandant adjoint de la FIAS, le lieutenant général Jim Dutton, s’est dit « confiant » d’obtenir les troupes d’infanterie et les hélicoptères supplémentaires demandés de manière temporaire afin d’assurer la sécurité des élections afghanes, prévues le 20 août. Selon lui, il recevra « quelques milliers » de soldats additionnels.

Dans un rapport, l’International Crisis Group (ICG) estime que la police afghane, qui est corrompue et marquée par les nominations politiques, est trop utilisée pour combattre l’insurrection au détriment de la lutte contre le crime. De plus, le programme de renforcement et de formation de la police n’a pas de stratégie globale ainsi que le personnel et les ressources adéquates. Selon ICG, ces efforts doivent être inclus dans les efforts globaux de renforcement de l’État.

L’Afghanistan souhaite que l’UE augmente les effectifs de sa mission de police en Afghanistan. Selon le ministre afghan de l’Intérieur, Mohammad Hanif Atmar, il faut « fournir un appui supplémentaire et allouer des ressources à l’EUPOL afin qu’elle réponde aux attentes (…) Étant donné les élections (prévues en 2009), certains des programmes devront être accélérés ». L’EUPOL-Afghanistan, qui appuie la police afghane, doit à terme avoir quelque 400 formateurs.

Le chef des forces spéciales allemandes (KSK), le général Hans-Christoph Ammon, a estimé hier que les efforts allemands destinés à former la police afghane ont été un « désastre » et un « échec lamentable ». Faisait remarquer que l’Allemagne n’a fourni que 12 millions d’euros pour leur formation comparé au milliard de dollars américains, le général Ammon considère « qu’à ce rythme, cela prendra 82 ans pour avoir une force de police correctement entrainée ».

Le gouvernement allemand annonce que ses effectifs policiers et civils dans le cadre de l’EUPOL Afghanistan passeront de 44 à 120 personnes. La mission de police de l’UE en Afghanistan, lancée en juin 2007, a comme objectif de renforcer les capacités de la police afghane afin que celle puisse maintenir l’ordre tout en étant respectueuse de l’État de droit et des droits de l’homme. Les membres de la mission proviennent de 17 pays.

La police met en place un programme de surveillance de quartiers à Kaboul et arrête deux individus responsables de plusieurs enlèvements. L’OMS annule sa campagne de vaccination contre la poliomyélite prévue en septembre au sud de l’Afghanistan qui devait toucher 1,2 millions d’enfants. Des combats tuent six militants dans la province de Ghazni tandis qu’un membre des renseignements afghans, sa femme et deux de ses fils sont assassinés dans la province de Kunar.

L’UE annonce qu’elle doublera les effectifs de l’EUPOL Afghanistan afin « de renforcer les efforts » vers une réforme de la police afghane. Les effectifs de l’EUPOL atteindront 400 personnes d’ici un an. Par ailleurs, le gouverneur de la Province de la Frontière du Nord-Ouest, Owais Ahmed Ghani, assure que « le Pakistan est pleinement engagé à interdire les mouvements transfrontaliers terroristes ». Le Pakistan y a signé le 21 mai un accord de paix avec les islamistes.

Le Haut Représentant de l’UE pour la Politique Étrangère et de Sécurité Commune (PESC) et Secrétaire général du Conseil de l’UE, Javier Solana, arrivent à Kaboul en vue de préparer la conférence internationale sur l’aide à l’Afghanistan prévue le 12 juin. M. Solana déclare que « la sécurité et la gouvernance sont les plus gros défis pour l’Afghanistan », ajoutant que « l’UE continuera de travailler avec le gouvernement (afghan) dans un effort de longue haleine ».

L’UE a annoncé hier que l’EUPOL-Afghanistan, qui doit compter à terme 200 personnes, sera complètement déployée d’ici mars. L’UE se dit prête à considérer une bonification de son engagement en Afghanistan, particulièrement dans le domaine policier et judiciaire. La police afghane, appuyée par la coalition internationale, tue 10 talibans, dont deux commandants, dans la province d’Uruzgan. Au Pakistan, deux attentats tuent au moins 26 personnes à Lahore.

Le représentant de l’UE pour l’Afghanistan, Francesc Vendrell, annonce que l’UE « espère pouvoir déployer la totalité des troupes de l’EUPOL-Afghanistan d’ici la fin du mois prochain ». Le ministre afghan des Affaires étrangères, Rangeen Dadfar, demande « à l’UE d’augmenter le nombre d’entraîneurs pour la police afghane ». La mission initiale doit compter 195 policiers et M. Vendrelle estime que « si nous performons bien (…) il y en aura davantage ».