Chronologie : genèse et développement de la Francophonie
1880-1950 : la naissance d'un mot vite oublié Le mot "francophonie" apparaît à la fin du XIXe siècle, sous la plume d'un géographe s'intéressant notamment à l'expansion coloniale française, pour retomber ensuite dans l'oubli. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, un mouvement associatif se développe autour de l'idée de rayonnement de la langue et de la culture françaises. L'importance de l'activité des associations est aujourd'hui encore une caractéristique majeure de la Francophonie, qui accorde une place et un rôle centraux à la société civile. 1880
Dans un ouvrage intitulé "France, Algérie et colonies", le géographe français Onésime Reclus invente le terme "francophonie". Dans le contexte de la fin du XIXe siècle, il prône l'expansion coloniale de la France et dans ce cadre s'intéresse au facteur linguistique. L' "Association nationale pour la propagation de la langue française dans les colonies et à l'étranger" ("Alliance française") est créée sous l'égide de l'ambassadeur Paul Cambon. L'année suivante est fondée l' "Alliance française" de Paris, au conseil d'administration de laquelle siègent notamment Ferdinand de Lesseps, Louis Pasteur, Ernest Renan ou Jules Verne. De nombreuses autres "Alliances françaises" vont rapidement voir le jour à travers le monde. L' "Alliance française" est reconnue d'utilité publique en France en 1886.
1950-1970 : l'essor d'un mouvement né hors de France Après la Seconde Guerre mondiale, le mouvement prend une ampleur nouvelle, sous l'action notamment d'Africains et de Canadiens français. Achevant son processus de décolonisation, la France s'en tient à une attitude prudente et réservée, tandis que des dirigeants africains, dont les présidents Senghor, Diori et Bourguiba, proposent dès les années 1960 la constitution d'une communauté francophone. 1950 L' "Union internationale des journalistes de la presse de langue française" (UIJPLF) est créée à Limoges à l'initiative d'un journaliste canadien Dostaler O'Leary. L'UIJPLF est devenue l'"Union internationale de la presse francophone" (UPF) en octobre 2001. 1960 La Conférence des ministres de l'Education nationale des pays francophones (CONFEMEN) est la première institution officielle francophone à être créée. 1961 L' "Association des universités partiellement ou entièrement de langue française" (AUPELF) est créée à Montréal par des universitaires, dans le but de développer les échanges et la solidarité entre les universités. Elle est devenue l' "Agence universitaire de la Francophonie" (AUF). 1962 Un numéro de la revue "Esprit" sur "le français dans le monde" marque la résurgence du mot et de l'idée de francophonie, lancés par Onésime Reclus plus de quatre-vingt ans plus tôt et depuis lors tombés dans l'oubli. Sous des plumes diverses et prestigieuses, dont celles de Léopold Sédar Senghor ou Norodom Sihanouk, les possibilités d'avenir de la francophonie y sont analysées. L'article signé par le grammairien, poète et chef d'Etat sénégalais L.S. Senghor est considéré comme le texte fondateur de la francophonie.
1965 Deux "Ententes" sont conclues par la France et le Québec, l'une sur "un programme d'échanges et de coopération dans le domaine de l'éducation" (27 février 1965), l'autre sur "la coopération culturelle" (24 novembre 1965). Cette dernière, dont le titre Ier est consacré à "la langue française", est considérée comme le premier accord international dans lequel Paris reconnaît en partager la responsabilité : "conscients des liens historiques que leur communauté d'origine, de langue et de culture a créés entre la France et le Québec" et "désireux de promouvoir la langue française et de développer leurs relations culturelles" (préambule), les gouvernements français et québécois s'engagent à "coopérer étroitement à la promotion et à la diffusion de la langue française" (article 1er). Juin 1966 Sous l'impulsion du Président Senghor, la Conférence des chefs d'État de l'Organisation commune africaine et malgache (OCAM) réunie à Tananarive propose la constitution d'une communauté francophone, définie comme "une communauté spirituelle de nations qui emploient le français, que celui-ci soit langue nationale, langue officielle ou bien langue d'usage". 1967 L' "Association internationale des parlementaires de langue française" (AIPLF) est créée à Luxembourg. Elle est devenue en 1998 l' "Assemblée parlementaire de la Francophonie" (APF). 1969 La Conférence des ministres francophones de la Jeunesse et des Sports (CONFEJES) est créée. 17-20 février 1969 La première conférence intergouvernementale des Etats francophones se réunit à Niamey (Niger). Dans le prolongement de l'action des présidents Senghor du Sénégal, Diori du Niger et Bourguiba de Tunisie, il s'agit de trouver les moyens de maintenir et renouveler les liens unissant la France à ses anciennes colonies nouvellement indépendantes et au-delà à l'ensemble des pays parlant français. La Conférence est placée sous le patronage du ministre français des Affaires culturelles André Malraux. André Malraux, discours prononcé à la Conférence des pays francophones, Niamey, 17 février 1969 (extrait).
1970-1990 : la réalisation du projet francophone
Après un premier pas en 1970, avec la création de l'Agence de coopération culturelle et technique, il faut attendre les années 1980 pour assister à une réelle reprise de cette idée : en 1986 se tient ainsi le premier sommet des chefs d'Etat et de gouvernement francophones. 16-20 mars 1970 La deuxième conférence intergouvernementale des Etats francophones aboutit, à Niamey le 20 mars 1970, à la signature par 21 pays de la Charte créant l'Agence de coopération culturelle et technique (ACCT). Elle donne ainsi naissance à la première organisation intergouvernementale de la Francophonie, devenue "Agence de la Francophonie". Cette date du 20 mars deviendra en 1988 celle de la Journée internationale de la Francophonie. En France, est adoptée la loi n° 75-1349 du 31 décembre 1975 relative à l'emploi de la langue française, dite "loi Bas-Auriol", qui en impose notamment l'usage dans les domaines du commerce, du travail et de l'audiovisuel. Elle sera abrogée par la "loi Toubon" du 4 août 1994. 26 août 1977 Au Québec, est adoptée la loi 101, établissant une "Charte de la langue française", qui renforce notamment le statut du français dans la Province. 10 novembre 1978 L'Assemblée générale des Nations unies reconnaît à l'Agence de coopération culturelle et technique le statut d'observateur (résolution 33/18). 1er mai 1979 L' "Association internationale des maires et responsables des capitales et métropoles partiellement ou entièrement francophones" (AIMF) est créée à l'initiative du maire de Paris Jacques Chirac.
Sommet de Versailles et Paris. A l'invitation du Président François Mitterrand, une Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ayant en commun l'usage du français se réunit en France.
Sommet de Québec. A l'occasion de ce deuxième sommet francophone, les chefs d'Etat et de gouvernement définissent cinq secteurs d'activité prioritaires : l'agriculture ; l'énergie ; la culture et les communications ; l'information scientifique et le développement technologique ; les industries de la langue. La création d'un Institut de l'énergie est décidée (IEPF). 24-26 mai 1989 Sommet de Dakar (Sénégal). Il s'agit du premier sommet francophone à se dérouler en terre africaine et notamment dans le pays natal de l'ancien président sénégalais Léopold Sédar Senghor, à l'origine de l'idée d'une communauté francophone.
Pour sa part, la France annonce qu'elle efface la dette publique qui lui est due par les pays d'Afrique les plus pauvres, en renonçant au remboursement de ses créances sur 35 Etats africains, soit environ 16 milliards de francs. Juillet 1989 Les premiers "Jeux de la Francophonie", organisés à Casablanca et Rabat (Maroc), réunissent 1 800 participants venus de 30 pays. Depuis 1990 : un tournant politique et institutionnel Essentiellement consacrée à la coopération culturelle et économique, la Francophonie connaît dans les années 1990 un tournant politique et institutionnel. 19-21 novembre 1991
Sommet de Chaillot (Paris). La quatrième rencontre des chefs d'Etat et de gouvernement ayant en commun l'usage du français décide une importante réforme des institutions francophones : une Conférence ministérielle composée des ministres chargés de la Francophonie se réunira désormais à mi-parcours entre deux sommets ; un Conseil permanent composé des représentants des chefs d'Etat et de gouvernement est établi pour préparer et suivre les sommets. 25 juin 1992 En France, une révision constitutionnelle (loi constitutionnelle n°92-554) précise dans le texte de la Constitution de la Ve République que "la langue de la République est le français" (article 2, alinéa 1er). 16-18 octobre 1993
Sommet de Grand-Baie (Maurice). Le cinquième sommet francophone décide de rebaptiser cette instance "Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le français en partage", en remplacement de la formule antérieure "ayant en commun l'usage du français". 4 août 1994 En France, est adoptée la loi n°94-665 relative à l'emploi de la langue française, dite "loi Toubon".
Sommet de Cotonou (Bénin). Le sixième sommet francophone exprime une volonté d'affirmation politique de la communauté francophone sur la scène internationale.
Sommet de Hanoï (Vietnam). Le septième sommet francophone constitue un tournant institutionnel pour la Francophonie. 18 décembre 1998 L'Assemblée générale des Nations unies reconnaît l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) comme observateur (décision 53/453). La coopération croissante entre l'ONU et l'OIF fait régulièrement l'objet de rapports du Secrétaire général des Nations unies à l'Assemblée générale et de résolutions de cette dernière. 14-15 avril 1999 Une première Conférence des ministres francophones de l'Economie et des Finances, consacrée à l'investissement et au commerce dans l'espace francophone, est réunie à Monaco. Une Déclaration sur le développement d'un espace de coopération économique francophone est adoptée. Dans la perspective des négociations commerciales multilatérales à venir à l'OMC (Conférence de Seattle), les ministres affirment leur volonté de concertation pour que le système commercial international intègre mieux les valeurs défendues par la Francophonie, notamment la solidarité et la diversité culturelle. 3-5 septembre 1999
Sommet de Moncton (Canada, Nouveau-Brunswick). Le huitième sommet de la Francophonie a pour thème principal la jeunesse. Un Symposium sur le "bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone" est organisé à Bamako (Mali). Les délégations gouvernementales adoptent une Déclaration ainsi qu'un projet de programme d'action qui sera soumis au prochain Sommet. Après avoir constaté que "le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone, au cours de ces dix dernières années, comporte des acquis indéniables", mais qu'il "présente, aussi, des insuffisances et des échecs", les ministres et chefs de délégation des Etats francophones s'accordent notamment sur un dispositif d'observation et un mécanisme de réaction en cas de rupture de la démocratie ou de violation grave et massive des droits de l'Homme. 14-15 juin 2001 La troisième Conférence ministérielle de la Francophonie sur la culture, qui se tient à Cotonou (Bénin), réaffirme clairement que "la diversité culturelle constitue l'un des enjeux majeurs du XXIe siècle" (Déclaration de Cotonou). La Francophonie, "laboratoire de la diversité culturelle", rappelle son attachement à ce que les biens culturels fassent l'objet d'un "traitement spécifique" dans les règles du commerce mondial et affirme que "l'adoption par les Etats et les gouvernements de politiques culturelles de promotion de la diversité culturelle est plus que jamais légitime et nécessaire". 11 janvier 2002 La Conférence ministérielle de la Francophonie, réunie à Paris pour sa 16e session, entérine le projet de réforme du Haut Conseil de la Francophonie, créé en France en 1984. Organisme consultatif composé d'une trentaine de personnalités françaises et étrangères, il était présidé par le Président de la République française, qui a souhaité le faire évoluer. Le nouveau Haut Conseil de la Francophonie est placé auprès du Secrétaire général de l'OIF. 18-20 octobre 2002
Sommet de Beyrouth (Liban). Le thème du IXe Sommet de la Francophonie est "le dialogue des cultures". Les positions exprimées sur les questions internationales du moment (Irak, Israël-Palestine…) sont l'occasion pour la communauté francophone de s'affirmer politiquement sur la scène internationale. Adbou Diouf, ancien Président sénégalais, est élu Secrétaire général de la Francophonie et succède ainsi à Boutros Boutros-Ghali. 12-13 décembre 2002 18e session de la Conférence ministérielle de la Francophonie, à Lausanne. Pour la première fois, des représentants de trois organisations internationales ayant conclu des accords de coopération avec l'OIF interviendront devant les ministres francophones (CNUCED, Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, Union africaine). 15 janvier 2003 L'Assemblée parlementaire de la Francophonie adopte une "Déclaration de Strasbourg" [.pdf, 132 Ko] , dans laquelle elle s'inquiète de l'avenir du français et de la diversité linguistique dans l'Union européenne et proclame sa "détermination à promouvoir le français au sein des institutions européennes". "Nous exigeons que le français garde toute sa place dans l'Union européenne, tant comme langue de travail interne que comme langue de relations internationales", déclarent les parlementaires francophones. 4-5 septembre 2003 Les ministres francophones chargés des nouvelles technologies, réunis à Rabat (Maroc), adoptent la contribution de la Francophonie au Sommet mondial sur la société de l'information (Genève, 10-12 décembre 2003 et Tunis, 16-18 novembre 2005). Décidée lors du Sommet de Beyrouth en 2002, cette Conférence ministérielle de l'OIF sur la société de l'information s'inscrit dans l'action menée par la Francophonie en matière de nouvelles techonologies. 1er mai 2004 Cinq Etats de la Francophonie entrent dans l'Union européenne (UE). Huit pays sont ainsi à la fois membres de l'OIF et de l'UE : la Belgique, le Luxembourg, la France, la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie, la Slovénie et la République tchèque. 5-7 mai 2004 Un Symposium sur l'accès aux financements internationaux, organisé par l'Agence de la Francophonie (Paris), porte notamment sur les moyens de faciliter l'accès aux nouveaux modes de financement du développement. 26-27 novembre 2004
Xe Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement francophones (Ouagadougou, Burkina Faso), sur le thème : «la Francophonie, espace solidaire pour un développement durable». 23 novembre 2005 La Conférence ministérielle de la Francophonie, réunie à Tananarive (ou Antananarivo, Madagascar), adopte une nouvelle Charte de la Francophonie. Cette 21e session de la Conférence ministérielle parachève ainsi la réforme institutionnelle entreprise au Sommet de Hanoï en 1997. Dans un souci de simplification et de rationalisation des structures et du fonctionnement des institutions de la Francophonie, l'Agence intergouvernementale devient l'Organisation internationale de la Francophonie. Dotée de la personnalité juridique, elle est placée sous l'autorité du Secrétaire général de la Francophonie.
Une Conférence ministérielle de la Francophonie sur la prévention des conflits et la sécurité humaine se tient à Saint-Boniface (Canada). Les ministres adoptent une déclaration [PDF, 132Ko] commune. 28-29 septembre 2006 XIe sommet de la Francophonie à Bucarest (Roumanie). «Les technologies de l'information dans l'éducation» sont le thème principal de la rencontre. 17-19 octobre 2008
XIIe Sommet de la Francophonie à Québec. Outre la crise financière internationale, quatre thèmes principaux ont occupé les travaux des chefs d’Etat et de gouvernement francophones : la langue française ; la paix, la gouvernance démocratique et l’Etat de droit ; la gouvernance et la solidarité économiques ; l’environnement, le développement durable et les changements climatiques.
20 mars 2010 22-24 octobre 2010 XIIIe Sommet de la Francophonie à Montreux (Suisse). 3 000 représentants des 70 Etats membres de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) sont réunis autour du thème "Défis et visions d’avenir pour la francophonie". Ils adoptent la Déclaration de Montreux ainsi que neuf résolutions, portant notamment sur les situations de crise, de sortie de crise et de consolidation de la paix, la situation en Guinée, la reconstruction d’Haïti, la lutte contre les faux médicaments, la criminalité transnationale organisée, la piraterie et les actes terroristes. Les chefs d'Etat et de gouvernement présents plaident pour une plus grande place de l'Afrique dans les instances internationales, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies. Cinq nouveaux États observateurs sont admis à l’OIF : la Bosnie Herzégovine, la République dominicaine, les Émirats arabes unis, l’Estonie et le Monténégro. L’organisation compte désormais 75 États dont 56 membres et 19 observateurs. Le secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, est réélu pour un nouveau mandat. Le 14ème sommet doit se tenir à Kinshasa en 2012. |