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Georges Clemenceau, dit «le Tigre», est la principale personnalité des débuts de la IIIe République. Homme de gauche, contestataire-né, il est de tous les combats. Ainsi combat-il l'influence de l'Église catholique et dénonce-t-il les conquêtes coloniales, qui ont surtout le tort à son sens de détourner les Français de la seule cause qui vaille : la revanche sur l'Allemagne.

Lorsque l'affaire Dreyfus éclate, avec la publication de J'Accuse , il apporte son soutien à Émile Zola et s'engage résolument dans le camp dreyfusard. Il met la même énergie à défendre la peinture de son ami Claude Monet, lequel, reconnaissant, offrira les Nymphéas à la République.

C'est seulement à 65 ans qu'il entre au gouvernement et il attendra encore quelques mois pour en prendre la tête... Songeons que c'est au même âge qu'une autre personnalité d'exception, Winston Churchill, deviendra Premier ministre ; quant à Jean Jaurès, contemporain (et rival) de Georges Clemenceau, il n'aura jamais eu ne serait-ce qu'un ministère !

Au gouvernement, Georges Clemenceau se montre un farouche partisan de l'ordre et réprime sévèrement les manifestations de mineurs ou de viticulteurs...

Il donne enfin sa pleine mesure à la fin de la Grande Guerre, quand, appelé une nouvelle fois à la présidence du Conseil, il rassemble toutes les énergies en vue de la victoire finale.

René Castillon.
Un médecin en politique

Georges Clemenceau est né à Mouilleron-en-Pareds (Vendée) le 28 septembre 1841. Son père, un ardent républicain, le rallie très tôt à ses idées. Étudiant, il est emprisonné quelques semaines sous le Second Empire pour avoir troublé l'ordre public. Cela lui donne l'occasion de faire connaissance d'Auguste Blanqui, un éternel insoumis.

Il séjourne quatre ans aux États-Unis comme professeur et correspondant de journaux français. Il en revient avec une jeune épouse américaine et une bonne connaissance de la langue anglaise (fait alors rare). À 29 ans, il s'apprête comme son père à suivre une carrière de médecin quand la guerre le rattrape.

Il «monte» à Paris où, après la défaite de Sedan, l'amitié du maire Étienne Arago pour son père lui vaut d'être nommé maire de Montmartre par le gouvernement de la Défense nationale, en septembre 1870. Il dénonce l'armistice de janvier 1871 qui consacre la défaite de la France face aux armées prussiennes et affiche une proclamation où l'on peut lire : «On vous a livrés sans merci. Toute résistance a été rendue impossible».

Le 18 mars 1871, il assiste, impuissant, au massacre des généraux Lecomte et Clément Thomas par la populace de Montmartre. De ce massacre va sortir la Commune. Révulsé par la violence de la foule, Clemenceau en comprend néanmoins l'origine : les souffrances du siège et l'exaspération devant le défaitisme des dirigeants. Lui-même n'a que mépris pour les électeurs ruraux qui ont fait le lit de la République conservatrice de «Monsieur Thiers».

Un leader radical

Sous la IIIe République, en 1876, Clemenceau est élu député de Paris. Grâce à ses talents d'orateur, il prend la tête des députés de la gauche que l'on dit «intransigeante» ou «radicale».

À cette place, il va s'en tenir longtemps à un rôle d'opposant qui lui vaudra le surnom de «tombeur de ministères». Ainsi combat-il avec succès les gouvernements «opportunistes» de Jules Ferry. Évincé de la politique par le scandale de Panama, il se cantonne dans le journalisme mais revient en grâce avec l'Affaire Dreyfus. Il retrouve une tribune avec son élection de sénateur du Var en 1902.

Chef du mouvement radical, à l'extrême-gauche de l'échiquier politique, Clemenceau profite de son retour en grâce pour fonder le «parti républicain radical», au congrès de Paris des 21-23 juin 1901.

Le premier parti français

Le «parti républicain radical» a été fondé à l'occasion d'un congrès, à Paris, les 21-23 juin 1901, à l'initiative de Georges Clemenceau (qui lui-même ne veut pas en faire partie, se cantonnant dans son rôle d'éternel opposant). C'est le plus ancien parti politique français (auparavant, les élus se regroupaient par affinités mais ne disposaient d'aucune structure solide, avec financement et militants, pour les soutenir).

Quelques années plus tard, le 23 avril 1905, Jean Jaurès et Jules Guesde fondent à Paris le deuxième grand parti de la gauche française : la SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière).

Le 13 mars 1906, à 65 ans, le «tombeur de ministères» accède pour la première fois à un poste ministériel. Il est ministre de l'Intérieur dans le gouvernement de Ferdinand Sarrien et ne tarde pas à être mis à l'épreuve en réprimant sans ménagement les grèves de mineurs consécutives à la catastrophe de Courrières du 10 mars 1906.

Il devient enfin président du Conseil sept mois plus tard, le 18 octobre 1906. Ce gouvernement qui durera jusqu'au 20 juillet 1909 (un exploit sous la IIIe République) aura à gérer la crise viticole.

Sept mois plus tard, Clemenceau forme enfin l'un des plus longs ministères de la IIIe République, du 18 octobre 1906 au 20 juillet 1909. Dans son équipe figure pour la première fois un ministre du Travail, René Viviani. Le président du Conseil confirme son sens particulier du dialogue social lors des manifestations de vignerons languedociens victimes de la surproduction et de la mévente du vin. Il mène aussi à son terme la séparation des Églises et de l'État avec Aristique Briand ministre de l'instruction publique et des Cultes. Son ministre des Finances, Joseph Caillaux, qui deviendra son ennemi inexpiable, introduit l'impôt unique sur le revenu.

Va-t-en-guerre

De retour dans l'opposition, pendant les années dramatiques de la «Belle Époque» qui précèdent la Grande Guerre, Clemenceau s'affirme comme un revanchard et un va-t-en-guerre déterminé.

En 1913, il fonde un journal L'Homme libre. On peut y lire un article intitulé «Vivre ou mourir» avec cette adresse aux jeunes (lui-même a 72 ans) : «Un jour, au plus beau moment où fleurit l'espérance... tu t'en iras... au-devant de la mort affreuse qui fauchera des vies humaines en un effroyable ouragan de fer. Et voilà qu'à ce moment suprême... ta cause te paraîtra si belle, tu seras si fier de tout donner pour elle que, blessé ou frappé à mort, tu tomberas content !»

Dès la déclaration de guerre, L'Homme libre devient L'Homme enchaîné, en guise de protestation contre la censure, et multiplie les attaques verbales contre le gouvernement et l'état-major. En 1917, au plus fort de la Grande Guerre, Clemenceau torpille une proposition autrichienne pour une paix de compromis.

Jusqu'au-boutiste

Du fait de sa détermination à poursuivre la guerre jusqu'à la victoire totale, il est finalement appelé à la tête du gouvernement et rassemble alors toutes les énergies du pays en vue de la victoire. Il gagne les surnoms de «Tigre» et «Père de la Victoire». Avec affection, les poilus qui combattent dans les tranchées l'appellent plus simplement «Le Vieux».

Par haine de l'Allemagne, Clemenceau introduit dans le traité de paix de Versailles des termes humiliants qui serviront, plus tard, les desseins d'Adolf Hitler. Pas plus que les autres chefs alliés, il ne peut empêcher l'éclatement de l'Autriche-Hongrie en une myriade de petits États vindicatifs et indéfendables qui se révèleront des proies idéales pour le IIIe Reich hitlérien.

Passée la guerre, Georges Clemenceau est élu par acclamation à l'Académie française et reste à la tête du gouvernement jusqu'au 18 janvier 1920.

Dissuadé de se présenter à l'élection présidentielle, il se retire en Vendée, à Saint-Vincent-du-Jard. Après sa mort (24 novembre 1929), il reposera non loin de là, dans le parc de la maison familiale de Mouchamps, auprès de son père.

Bibliographie

Sur Georges Clemenceau, on peut lire bien évidemment de nombreuses biographies, dont celles de Jean-Baptiste Duroselle (la plus détaillée) et de Michel Winock, qui met l'accent sur la personnalité du Tigre (Perrin, 2007).

J'apprécie tout particulièrement celle de Philippe Erlanger : Clemenceau (Grasset, 1968). Elle met en lumière toutes les facettes du personnage et le replace surtout dans son époque.

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